Aujourd’hui va être une journée un peu plus difficile à raconter. C’est sans doute celle que j’ai le moins apprécié du séjour.
Non pas parce qu’elle est moins intéressante, mais surtout à cause de la même.
Aujourd’hui, nous sommes à Skagway !
Une journée sous la pluie
C’est la première fois depuis Vancouver que je vais toucher terre. J’ai hâte de me dégourdir un peu les jambes. Le bateau accoste relativement tôt ce matin, j’ai un stream prévu sur Twitch et je décide donc de me faire livrer mon petit déjeuner directement dans ma cabine.
C’est la première fois que j’essaie ça, c’est très efficace. Dans notre chambre, nous avons tous une feuille avec des cases à cocher représentant tout ce qui peut être servi pour ce repas. On peut commander ce que l’on souhaite, dans les quantités que l’on souhaite, et cela sera livré à l’heure prévue.
Mon lait, mes céréales et mes croissants avalés, il est temps de sortir sur le pont supérieur pour voir à quoi ressemble Skagway. Je sais que nous sommes arrivés, le navire ne bouge plus.
À l’extérieur, les nuages sont très bas et il pleut vraiment beaucoup. C’est assez normal en Alaska, c’est l’une des régions du monde où il pleut le plus souvent. C’est aussi une période de l’année où cette météo est plus fréquente qu’à l’habitude. En préparant ce voyage, je savais qu’il allait pleuvoir en quantité… De ce côté-là, je n’ai pas été déçu.
À notre droite se trouvent deux autres paquebots de croisière, c’est la fin de la saison pour ce type de navire et nous n’allons pas en croiser tant que ça sur notre route. Le plus long, je le reconnais, était au port de Vancouver lorsque je suis arrivé… C’était quand déjà ? Le 10… Mais quel jour ? Serais-je en train de perdre la notion du temps ? En vacances, c’est plutôt bon signe.
Skagway !
Pour la deuxième fois du séjour, je descends tout en bas du bateau et je sors. Je touche enfin la terre ferme, et je dois avouer que cela fait du bien. Le centre-ville est à quelques minutes de marche du port, et il est très facile de s’y rendre à pied.
Skagway est une ville qui a connu la ruée vers l’or, une période bien connue de l’histoire de l’Alaska et des États-Unis. C’est une époque où de nombreuses personnes affluaient en quête de richesses. Personnellement, je connais cette ville à travers les yeux de Picsou lorsqu’il est allé à la recherche de sa première pépite dans le Klondike. Le Klondike est d’ailleurs accessible en train depuis Sitka. Bien que désormais utilisé principalement à des fins touristiques, ces trains font partie de l’histoire des États-Unis.
Skagway est une ville vraiment charmante, une ville typiquement américaine figée dans le temps, où l’on peut facilement imaginer à quoi elle ressemblait il y a quelques décennies, voire un siècle. Les devantures des boutiques sont en bois, tout comme le sol sur lequel je marche. C’est assez petit, et je sais que nous en aurons vite fait le tour.
« On », parce qu’il est temps de lancer mon stream… Qui ne s’est pas déroulé comme prévu. Les nuages bas et la pluie perturbent les signaux 4G, rendant impossible la tenue du live dans de bonnes conditions. Les coupures sont systématiques, il n’y a pas un endroit où le signal passe correctement. Assez déçu, je décide, au bout de 10 minutes, de couper. Le prochain sera à Ketchikan, en fin de séjour, et j’espère que tout se passera bien. Il y a vraiment quelque chose de grisant à pouvoir être en direct sur Internet, à l’autre bout du monde.
C’est donc seul que je vais découvrir cette ville, où les boutiques ouvrent au fur et à mesure. Ce qui frappe le plus, c’est le nombre de boutiques vendant de l’or. Nous sommes dans la région parfaite pour cela, et ramener une pépite du Klondike a de quoi être symbolique. Je regarde brièvement le cours de l’or du moment, et je rentre dans l’une d’entre elles.
Autant le dire tout de suite, ce genre de boutiques est très similaire à des marchands de tapis, tout est négociable. Je demande à voir des pépites d’or, et on m’en montre une assez impressionnante, que je ne prends pas en photo. Je précise que ce que je souhaite est juste pour le souvenir et que je ne souhaite pas ramener quelque chose d’aussi gros. La personne décide alors de me montrer ce qu’elle a de plus petit, quelques grammes. Des petits poids, mais quand on les pèse au creux de sa main, ça n’a bizarrement rien de léger.
Le tarif qu’elle m’indique d’abord est assez élevé comparé au cours du moment. Je lui dis que je ne peux pas me permettre cela à ce prix. Elle appelle son responsable, qui va recalculer le tout. Je comprends alors que la négociation fait partie du jeu et qu’importe le tarif qu’il va me donner, il faut que je le baisse encore. Une fois ses calculs faits, celui qu’il me donne pourrait me convenir, mais je décide de le titiller un peu. Je propose un tarif qui est 75$ en dessous du sien, histoire de tomber sur une somme ronde, et surtout un tarif qui est 65$ au-dessus du cours. En ce sens, je sais qu’il aura toujours une marge commerciale. Il accepte ! Je suis propriétaire d’une pépite d’or que je vais ramener jusqu’en France… Et surtout ne pas perdre. J’ai son certificat d’authenticité, je sais d’où elle provient réellement dans la région. Ce n’est pas une pépite venue d’Afrique, comme beaucoup peuvent en vendre, c’est bien un souvenir de la région.
A la recherche des ours
Il pleut toujours, et il est temps de rentrer au bateau. Dans un peu plus d’une heure, j’ai mon excursion du jour et il est temps de me préparer un peu. Je rejoins donc le port, bien mouillé, et remonte dans ma cabine pour prendre les objectifs photos qui n’ont pas bougé ce matin.
Aujourd’hui, c’est l’occasion d’aller voir les ours sauvages et les aigles à tête blanche de Skagway. L’aigle est l’un des symboles des États-Unis, le voir dans son milieu naturel doit être quelque chose d’assez impressionnant… Tout comme l’ours d’ailleurs. Cet animal si imprévisible tient sa réputation.
Le périple du jour est assez loin de Skagway, il faut reprendre un bateau et traverser tout le fjord pour rejoindre la destination du jour. Je me retrouve dans un bateau similaire à celui de la veille. La différence est qu’il n’y a pas grand-chose à voir aujourd’hui, la brume et la pluie recouvrent le paysage et tout est relativement opaque à mes yeux.
Une fois arrivé de l’autre côté, nous rencontrons nos deux guides dont les noms m’échappent aujourd’hui. C’est un monsieur d’un certain âge qui fera la visite, tandis que quelqu’un qui est probablement de la même génération que moi fera la conduite de la navette.
Nous avons droit à un petit repas avant de partir, il ne me laissera pas non plus un souvenir impérissable. Un sandwich, des chips, une bouteille d’eau. Le strict minimum, ni bon, ni mauvais. Tous nos déchets doivent rester à l’endroit où nous mangeons. Les ours peuvent rôder assez près des habitations et les guides préfèrent gérer eux-mêmes cette étape.
Nous partons ensuite à la chasse à ces animaux… Ça a été l’après-midi la plus longue de ce périple en Alaska. Nous avons fait des tours et des détours avec la navette en espérant voir les ours, mais rien. Il pleuvait tellement qu’ils n’avaient clairement pas envie de se montrer.
Nous avons fait quelques arrêts, les guides sortaient leurs lunettes pour essayer d’apercevoir les aigles en haut des sapins, mais rien également.
Je pense que ce qui m’a le plus énervé, c’est le fait que les guides passaient et repassaient toujours aux mêmes endroits. Nous sommes constamment restés proches d’un cours d’eau, mais si les plantigrades ne se montraient pas une fois à l’aller, ils n’allaient pas se montrer non plus au retour.
Un peu déçu et désabusé, les guides nous annoncent que nous allons retourner au port. Nous tournons depuis environ 2h, sans rien voir, la pluie tape sur le moral. J’ai hâte de remonter à bord du Wonder, au chaud, dans un univers moins triste qu’ici… Et puis…
Ma voisine de droite crie avec une voix qui va résonner dans toute la navette : « sur la gauche là-bas !! » La navette ralentit au niveau du cours d’eau, de l’autre côté se trouve un ours… Plutôt une oursonne puisqu’elle est accompagnée de 2 petits oursons.
Ils sont là, à chasser le saumon. C’est très honnêtement le spectacle le plus mignon que j’ai pu voir. L’ours adulte apprend aux petits à pêcher. Pas n’importe quel saumon, elle se nourrit exclusivement de saumon femelle riche en oméga 3. Elle chasse avec une grande dextérité et ses petits l’observent, et essaient les mêmes gestes avec plus ou moins de succès.
Pendant tout ce temps, mon appareil mitraille littéralement ce que je vois. C’est fascinant, tout simplement fascinant. Ce sont des animaux sauvages, ils vivent ici, nous sommes chez eux.
Les guides nous disent que nous avons pris du retard, pour la bonne cause, et qu’il est vraiment temps de regagner notre navette fluviale avant de remonter à bord du Wonder. Je lâche un dernier regard aux ours, pour bien imprégner le moment et décide de ranger l’appareil.
Heureusement que cette partie a sauvé un peu le reste de la journée. Ce n’est pas une excursion que je recommencerai, même si la météo y joue pour beaucoup et qu’elle est bien évidemment imprévisible.
En rentrant, je décide de regarder mes photos pour en choisir celles qui sont les plus intéressantes. Le repas arrivera rapidement après, aujourd’hui il est au Triton. Le même restaurant que le 1er soir à bord.
Une soirée et des jeux
Je suis fatigué après cette journée où la pluie n’a fait que tomber. À table, mes voisins ont eu toutes leurs excursions annulées à cause de la météo. Je m’estime donc heureux d’avoir quand même pu réaliser la mienne aujourd’hui. Ils se souviennent des photos de la veille et me demandent si j’en ai d’aujourd’hui. Là encore, c’est avec des yeux ronds comme des billes qu’ils les découvrent.
En plus de les montrer à eux directement, je mets aussi ces photos sur le groupe Facebook de la croisière. D’autres personnes sur le bateau voient ces photos et j’aurai plusieurs fois pendant cette croisière de gentilles remarques.
À la fin du repas, nos serveurs nous proposent souvent des jeux, à base de crayons qu’il faut déplacer pour former d’autres formes. Par exemple, avec 6 crayons, ils forment un 9 sur la table et nous devons en bouger qu’un pour faire un 4. Nos 6 cerveaux semblent habitués à ce genre de choses et les énigmes ne font pas un pli. Le serveur principal passe alors à l’étape du dessus, avec une énigme orale du genre « qu’est-ce qui est au milieu de la mer, à la fin de terre, etc… » en anglais bien sûr. Je ne laisse même pas le temps aux autres de réfléchir une seconde « la lettre e »… Steeve me regarde avec des yeux ronds comme des billes « mais comment fais-tu ? Ce n’est même pas ta langue maternelle ?! »
Je lui explique que quand je forme une phrase en anglais, je visualise les mots que j’emploie dans ma tête. C’est donc pour moi assez évident, même si ce n’est pas ma langue maternelle, de comprendre cette énigme.
Je lui dis que discuter avec d’autres personnes en anglais était ma plus grande appréhension, n’étant pas sûr de mon anglais parlé. Ses mots étaient rassurants ce jour-là, que je n’avais pas à m’inquiéter là-dessus, parce que mon niveau était bon… Et qu’il n’aurait jamais pu faire la même chose dans l’autre sens.
C’est bon d’entendre ces choses-là, ça rassure, ça conforte… Et je pense que c’est peut-être ce qu’il manque à certains professeurs d’anglais qui ont essayé de m’apprendre cette langue dans ma scolarité… Des encouragements.
Le repas se termine, je retourne dans ma cabine pour passer la nuit. Je découvre la nouvelle œuvre en serviette, un ours… Tiens donc ^^ La peluche Mickey est aussi disposée sur le lit, en train de lire le dernier numéro de National Geographic.
Demain… J’ai hâte d’être à demain… Mon voyage va prendre tout son sens.